dimanche 12 juillet 2015

A a peine 17 ans il a déjà « vécu et je commence a savoir ce que c’est la vie de l’homme et il ne faudra pas l’on m’embête….on voit la mort quelques fois bien prêt mais ca ne fait rien on n’est pas des Fortier pour rien.. »

« 9 - 7 – 15
Chère Maman
Je t’écris pour te donner de mes nouvelles, je me porte toujours bien et je pense que ma présente vous trouve à tous de même.
Il est 9 heures 20 je suis de garde au poste et je profite pour écrire car dans le jour on a du travail par-dessus la tête. Tu me dis que Cyrille est versé à Bône aux tirailleurs je suis content car il pourra toujours avoir une embusque et s’il vient au front il ne viendra qu’après l’hiver ce ne seras que l’occupation du territoire ennemi par les troupes alliées. Je pense qu’il tacheras de voir mon parrain et ma marraine, je leur ai écrit ils ne m’ont pas répondu.
La tante Anna m’a envoyé 5F00 je vais lui envoyer quelques bagues pour lui faire plaisir.
Je désire que tu me dise si le blé nous a rapporté beaucoup et de combien il nous as rendu et a combien tu as traité.
Les voleurs doivent tourner mais si dieu veut que je retourne, je pense que j’en descendrai quelques uns car j’ai vécu et je commence a savoir ce que c’est que la vie de l’homme et il ne faudras pas que l’on m’embête aussi bien du plus gros jusqu’au plus petit parceque on voir la mort quelque fois bien prêt mais ça ne fais rien, nous ne sommes pas des fortier pour rien, je vois à présent que ce que le pauvre papa me disait que c’est vrai et je voudrais qu’il soit encore en vie pour lui raconter les trucs de la guerre, je sais que ça lui ferait bien plaisir.
C’est la destinée
Je pense que le travail doit bien marcher et que les ouvriers ne doivent pas te faire du mauvais sang.
Monsieur Eugene doit faire de son mieux, c’est lui le patron j’ai reçu sa carte qui m’a fait bien plaisir de voir qu’il ne vous abandonne pas.
Je termine ma lettre en vous embrassant à tous, Ton fils pour la vie.

Gustave Fortier »
« ….tu me dis que Cyrille est versé à Bône aux Tirailleurs »
Cyrille est en effet au 3eme Régiment de Tirailleurs Algériens basé à Bône à l’est de l’Algérie. Vers fin aout 1915, il est né le 23 aout 1895, donc incorporé normalement à 20 ans. Sa 1ere lettre sera daté du 26 septembre 1915.
Cyrille Fortier, frère de Gustave
A a peine 17 ans il a déjà « vécu et je commence a savoir ce que c’est la vie de l’homme et il ne faudra pas l’on m’embête….on voit la mort quelques fois bien prêt mais ca ne fait rien on n’est pas des Fortier pour rien.. » Il évoque son pauvre Papa perdu a peine 1 an plus tôt a qui il aurait aimé lui raconter « les trucs de la guerre.. »
Gabriel Fortier, père de Gustave
Gustave s’inquiète des récoltes et du prix du blé « les voleurs tournent ». Le prix du blé libre auparavant sera réglementé avec la guerre, plusieurs loi vont fixer également le prix maximum des denrée a base de céréales.
Les Céréales : Le Maghreb a toujours cultivé des céréales, blés durs, qui ont toujours donné aux indigènes la semoule, base de leur alimentation; orge, qui donne aussi du pain et qui, dans l'alimentation des chevaux, remplace l'avoine de chez nous; pour mémoire, dans certains coins; la Kabylie par exemple, le sorgho (bechna).
La colonisation a introduit des céréales nouvelles, le blé tendre par exemple, l'avoine, le maïs, mais ces céréales nouvelles restent subordonnées. Elles n'ont pas détrôné le blé dur et l'orge qui sont adaptés au pays, et auxquels une sélection millénaire a donné des qualités très appréciées.
L'influence de la colonisation, qui est énorme, a porté sur autre chose : les instruments et les méthodes de labour. L'indigène ne connaissait que l'araire, la petite, charrue à soc en bois, qui égratigne le sol. Le colon a introduit la grande charrue des labours profonds. Les machines agricoles modernes ont une très grande diffusion et sont l'objet d'un gros commerce d'importation. Ajoutez l'usage du fumier, des engrais chimiques. Malgré les efforts prolongés des colons, le blé dans la Mitidja n'a jamais pu rendre plus de 10 à 12 pour 1. C'était un progrès énorme; l'indigène  n'obtient guère que du 5 au 6. Mais sur nos plateaux limoneux de la Picardie, par exemple, le rendement est de 40 à 50.



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